"La Vie Hospitalière"

lundi 5 juillet 2010

Le passage en "autonomie" des 4 maisons de retraite amiénoises ou comment des partis "dits de gauche" privatisent en douceur.

Le passage en "autonomie" des 4 maisons de retraite amiénoises ou comment le PS privatise en douceur.


 Amiens est une des seules villes en France à gérer 4 maisons de retraite directement. C’est un héritage de la politique sociale de René Lamps, maire communiste d’Amiens entre 1971 et 1989. On sait que la droite avait pour projet de rendre autonomes nos 4 maisons de retraite. Nous sommes étonnés que notre majorité de gauche réalise ce que la droite avait prévu de faire.


Prenons les arguments un par un :



1. On nous a dit que gérer les maisons de retraite, c’est trop compliqué et trop bureaucratique. À cela on répond que la mairie peut simplifier d’elle-même les choses en réorganisant ses services. On pourrait embaucher par exemple une personne chargée de faciliter le travail des commandes. Il n’est pas normal qu’il soit nécessaire d’avoir au moins 6 signatures pour une simple commande de matériel ou que le personnel doive préparer dès septembre les soirées de Noël. Mais on ne peut pas rendre la gestion directe responsable de cet état de fait. C’est à notre majorité d’avoir la volonté politique d’améliorer le service. D’ailleurs les dérives bureaucratiques touchent aussi les entreprises privées, ce n’est pas propre au service public.



2. On a dit que les maisons de retraite, ce n’est pas de la responsabilité de la mairie. Le Conseil général et l’État n’ont donc qu’à se débrouiller. Le Conseil général de la Somme n’aura pas les moyens de combler le trou que la mairie laissera derrière elle. La Région, le Conseil général et la Mairie sont dirigés par le PS : en étant solidaires, ces collectivités pourraient défendre et développer les services publics face à la droite gouvernementale. Il faut croire qu’elles préfèrent suivre les exigences ultra-libérales de l’Union Européenne.



3. Ensuite on a affirmé que l’autonomie mettra fin à la précarité d’une bonne partie du personnel. La mairie a du mal à recruter pour assurer les remplacements. Seulement elle peut mettre en place des concours de recrutement. Ainsi il y a 1 concours tous les 4 ou 5 ans, on peut passer à 1 par an. Donc la mairie peut résorber la précarité tout en gérant les maisons de retraite directement. Les maisons de retraite vont être réorganisées le 1er septembre prochain. Les représentants syndicaux ont demandé à ce que tout le monde soit titularisé avant le passage en EPA afin que les emplois soient garantis avant le changement de statut... Cela a été refusé ! Peut-on traiter ainsi le personnel alors qu’il y a peu de titulaires en EHPAD aujourd’hui ? Si on admet que le passage en EPA était absolument nécessaire, on aurait pu le faire au mieux car les salariés n’ont aucune garantie d’emploi au moment du passage en EPA.



4.On veut nous faire croire que l’autonomie des maisons de retraite va permettre au personnel d’avoir un meilleur statut, celui d’hospitalier. En fait, les infirmières référentes n’auront pas un statut équivalent, ce qui aura un impact sur leur carrière et leur salaire. Il faut aussi tenir compte de l’impact des lois Bachelot qui facturent chacun des actes médicaux comme une marchandise alors qu’un même acte peut être différent en fonction du patient. Cette pratique a plongé 80 % des hôpitaux publics dans le déficit. Cela risque d’arriver à l’EPA qui va être mis en place début 2011... Il sera donc impossible de maintenir les mêmes salaires. En plus les agents de service hospitalier devront devenir polyvalents. On ajoute des missions à celles qui existent déjà. On veut faire des gains de productivité. Une phrase du document remis en Comité technique paritaire est très représentative de cet état d’esprit : « aujourd’hui les tâches assignées aux veilleurs n’apportent pas de plus-value ». On parle des maisons de retraite comme d’une usine où les salariés ne sont pas aux services d’un public mais au service de la rentabilité financière !



5. On prétend que l’autonomie va stabiliser les équipes. Déjà 16 personnes ont choisi de rester agents de la mairie, ailleurs que dans les maisons de retraite. Il faut les reclasser, ce qui n’est pas simple. Ensuite sur 219,49 équivalents temps plein, on n’en trouve plus que 212 en EPA. Soit 7,5 postes en moins. On sait aussi que des départs en retraite qui ont lieu en ce moment ne sont pas remplacés.Le personnel est déjà débordé aujourd’hui. On leur prépare des conditions de travail plus difficiles... Et ce sont les résidents qui vont subir cela. De plus, la mairie perd des compétences en matière de soins. A force que va-t-il lui rester ?



6. Les animateurs : le service des personnes âgées de la mairie va les mettre à disposition de l’EPA mais le secteur animation pourra, au besoin, les utiliser pour d’autres missions. En plus combien de temps ce système va-t-il durer ? Comme on fait des économies de personnel, on dira à l’établissement autonome d’embaucher lui-même ses animateurs ! Ce qu’évidemment il ne pourra pas faire...



7. QUI va payer le passage en autonomie ? Les EHPADS recevaient entre 1 et 2 millions d’euros par an pour équilibrer leurs comptes. En commission, on nous a dit que l’intérim coûtait cher. C’est vrai mais cela représente au maximum la moitié de la somme. Il reste au moins 500 000 euros. Qui va payer ? Le conseil général de la Somme ne peut pas. Ce sera donc les résidents. Ainsi la mairie a décidé lors de la réunion du conseil de vie sociale du 21 juin dernier que le montant de l’augmentation journalière soit fixé à 4,10 euros par jour. Cela fait une augmentation de 127,10 euros par mois ! Les élues représentantes des familles, Mesdames Duchene-Frere et Lemée, considèrent que cette augmentation ne se justifie pas car la qualité des prestations n’est pas de meilleure qualité. Par l’augmentation des loyers on veut déjà que les maisons de retraite soient rentables avant le passage en autonomie. Les résidents doivent payer pour des problèmes de gestion qui ne sont pas les leurs... La mairie doit assumer ses responsabilités en tant que collectivité. Il y a aussi un autre problème au sujet des loyers. Les maisons de retraite de Maurice Fécan et Léon Burckel appartiennent à l’OPAC. Le bail dure jusqu’en 2016. Fécan paie 22 000 euros par an et Burckel 125 000 euros. Qui va payer ? Encore les résidents et leur famille.



8. Quel service sera rendu aux personnes âgées ? Le poste d’esthéticienne sera supprimé le 31 décembre 2010. Cette mission ne relève pas des soins. On considère donc qu’il ne sert à rien. Cela en dit long sur la façon de voir la vie dans le nouvel établissement. On le conçoit juste comme un établissement médical et non comme un lieu de vie. Y aura-t-il encore une vie collective ? On peut en douter. Chaque résident bénéficiera de services en fonction de ses ressources. Cela va créer des inégalités dans l’offre de service que l’on doit rendre aux résidents. En plus on sait le partage de moments collectifs peut être bénéfique pour la santé des personnes âgées. Là on encourage le repli sur soi...



Pour résumer, voici les conséquences principales :



Les coûts de fonctionnement retomberont sur les résidents des maisons de retraite. Aujourd’hui un mois en maison de retraite représente une dépense qui se situe entre 1600 et 1900 euros sans les aides. Il est fort probable que le coût à prévoir s’alignera sur celui des maisons de retraite privées c’est-à-dire environ 1000 € de plus.



Voilà ce que disait notre programme électoral, celui pour lequel nous avons été élus : PAGE 27 : Leur appétit de profit (celui des maisons de retraite privées) se répercute sur les résidents et les prix flambent.Cela peut aller jusqu’à 2.800 euros mensuels auxquels il faut ajouter les services : coiffeur, pédicure, lavage du linge, visites médicales... Quand les personnes ne peuvent plus payer, elles partent... pour où ?



Que fait-on aujourd’hui en votant l’autonomie des 4 maisons de retraite ? On fait l’inverse de notre programme ! Car l’EPA fera payer chacun des actes pour être rentable...



On peut même dire qu’il y aura à long terme une privatisation. L’EPA fera des conventions sur certains actes médicaux avec des établissement privés pour éviter les déficits...



D’autre part, au niveau municipal, on veut faire des économies. On ne veut plus gérer le personnel. On ne veut plus avoir de responsabilités dans sa gestion, ni dans sa formation. On nie le nécessaire contrôle démocratique des services rendus à la population. Nous n’avons pas de mandat pour cela.



Donc ce sera "Du personnel en moins avec des tarifs plus chers !" Ce sera alors un service de moins bonne qualité pour plus de dépenses des résidents et leur famille.



Tout cela est en accord avec ce que fait l’État dirigé par la droite ainsi que le montre la politique de Révision Générale des Politiques Publiques décidée en 2007.



Toute activité publique est limitée par un budget fixé a priori sans évaluer les besoins de la population.



C’est pourquoi la droite gouvernementale a supprimé 178 tribunaux d’instance et 23 tribunaux de grande instance. C’est pourquoi elle supprime 35 000 postes de fonctionnaires par an. Par exemple on a supprimé 30 postes de professeurs des écoles sur Amiens-Métropole cette année. Vous l’avez dénoncé, Monsieur le Maire, mais vous appliquez cette politique aux maisons de retraite... Vous dénoncez l’État mais vous mettez en place sa politique de casse des services publics.



Notre mairie applique une politique contraire à son programme mais fidèle à la règle définie par l’Union Européenne de la concurrence libre et non faussée, véritable machine de guerre contre les services publics.



Nous restons fidèles au programme en votant CONTRE cette délibération.



Et surtout nous ne voulons pas porter la responsabilités de la désorganisation des services que nous devons à nos aînés. Nous avons le souvenir de ce qui s’est passé dans les parkings ou dans les transports en commun.



Cette politique est inefficace. On croit faire des économies. Et ce sont les Amiénois qui en subissent les conséquences. Donc le coût social est bien plus important.



En conclusion, nous demandons le maintien du budget qui revient de droit aux personnes âgées. Nous proposons même le développement et la diversification de l’accueil des personnes âgées. Toutes n’ont pas besoin d’une aide médicale lourde mais d’un simple suivi. Il faudrait inventer un lieu de vie qui serait conçu avec la participation d’un conseil de séniors dont on attend toujours la création (page 26 du programme municipal).



CONTRE 3 : les élus communistes Fabienne Debeauvais, Maria-Helena Loew et Cédric Maisse



ABSTENTIONS : 11 (les 2 groupes de droite)



POUR : tous les élus socialistes et Verts + 5 communistes et apparentés !


de Cédric Maisse


http://cedric.maisse.over-blog.fr/

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